Faire Métropole sans défaire les territoires
La Métropole de Paris, établissement public regroupant Paris et les intercommunalités à fiscalité propre de l’unité urbaine, devait être créée au 1er janvier 2016 pour conduire des actions d’intérêt métropolitain, de développement durable et d’amélioration de la compétitivité et l’attractivité de son territoire. Elle devait s’appuyer, selon le projet de loi présentée par la Ministre Marylise Lebranchu au Sénat en juin, sur un territoire d’intercommunalités à fiscalité propre, rassemblant les trois départements de petite couronne.
Ce mouvement est interrompu brutalement par le projet d’amendement présenté par le Gouvernement, sous l’influence de parlementaires franciliens.
Alors que depuis plus de vingt ans le mouvement de coopération intercommunale était non seulement revendiqué mais assumé par une très large majorité des élus de gauche et souvent de droite, et que le principe de libre association des communes était considéré comme un principe intangible, les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) existants de la « petite couronne » sont appelés aujourd’hui à disparaître.
Dans le texte qui sera débattu à l’Assemblée nationale à partir du 16 juillet, les EPCI à fiscalité propre existant au 31 décembre 2014 et d’environ 300 000 habitants sont constitués en des « territoires » qui n’ont aucune compétence propre, ni aucune autonomie.
Toutes les compétences que les communes ont transférées aux EPCI sont automatiquement transférées à la métropole.
Le conseil de la métropole peut toutefois restituer les compétences aux communes.
En effet, l’article 12 (ex-article 10) concernant les dispositions spécifiques à l’Ile-de-France s’éloigne dans sa nouvelle rédaction de celle présentée au mois de juin dernier par la Ministre de la Réforme de l’Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique devant le Sénat, que celui-ci avait rejeté par 161 voix contre 156.
Rejetant de fait la création de la métropole de Paris, sujet de réflexion depuis de nombreuses années, objet de rapports multiples et de propositions élaborées du Syndicat mixte d’étude Paris Métropole.
En l’état et selon le calendrier prescrit, l’amendement gouvernemental conduit à des transferts d’une grande complexité tant pour les compétences que pour les dizaines de milliers d’agents concernés parce qu’il induit des subdélégations à des conseils de territoire sans pouvoir ni moyens propres.
Le mouvement intercommunal avait pourtant permis, naturellement et par étapes successives, de développer des structures de gouvernance stratégiques, partagées, et légitimées par des projets de territoire communs.
Une nouvelle filière professionnelle, celle des personnels intercommunaux, était née en lien avec ces structures.
Nous considérons donc que l’amendement présenté par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles pour en modifier l’article 12 n’est pas recevable en l’état.
Nous proposons d’amender le projet de loi en revenant à la généralisation sur toute l’aire urbaine métropolitaine à des EPCI correspondant à des grands pôles de développement et à des territoires de projet, en créant une métropole du Grand Paris dotée de compétences particulières et de droit commun, qui permettent à la Métropole de Paris de répondre aux défis d’une ville Monde, envergure que l’agglomération parisienne doit revendiquer et atteindre.
Au titre des compétences particulières la Métropole de Paris élabore un projet métropolitain afin de promouvoir un modèle de développement durable, d’améliorer l’attractivité du territoire, et d’en réduire les inégalités.
Elle élabore un plan climat – énergie, un plan de l’habitat et de l’hébergement, définit et met en œuvre des programmes favorisant la transition énergétique.
En outre, la Métropole de Paris peut se voir déléguer par l’Etat des compétences supplémentaires pour la garantie du droit à un logement décent, pour la mise en œuvre de la procédure de réquisition, et pour la gestion de l’urgence sociale.
La Gouvernance d’une telle structure doit se faire sur la base des intercommunalités, et de la démocratie citoyenne directe. Le conseil métropolitain doit être constitué de représentants des territoires intercommunaux, et à part égale d’un collège des maires, renouvelé tous les deux ans pour associer tous les maires de la métropole.
Au total les objectifs poursuivis par l’amendement gouvernemental pourraient être ainsi atteints de façon plus efficace, l’ambition de la métropole parisienne s’appuyant et prolongeant les dynamiques territoriales.
Jacques Salvator
Maire d’Aubervilliers
Vice-Président de Plaine Commune
Patrick Braouezec
Président de Plaine Commune
Le 17 juillet 2013