Plaine Commune change de tête
C’est le 11 janvier que le relais devrait se faire entre les deux hommes. Une date, et ce n’est pas un hasard, qui sera celle de l’arrivée officielle de La Courneuve au sein de la communauté d’agglomération.
En passant de sept à huit villes et avec plus de 300 000 habitants, Plaine Commune achève sa croissance (à moins que Saint-Ouen ne se décide à la rejoindre).
Fonctionnant désormais à plein régime, ayant à sa charge une quinzaine de compétences déléguées par les villes (aménagement, développement économique, entretien de l’espace public, collecte des déchets ménagers, etc.), l’agglomération va entamer une nouvelle phase de sa jeune existence.
De la naissance de l’association intercommunale, célébrée en grandes pompes il y a cinq ans dans les salons du Stade de France, à la confirmation de son rôle prépondérant (on lui doit le regain économique de la Plaine-Saint-Denis), Jacques Poulet aura dirigé cette période de construction.
L’élection du maire de Villetaneuse,
la plus petite ville de l’agglomération, à la tête de Plaine Commune avait
été voulue par ses pairs pour signifier que chaque collectivité aurait la même importance au sein de la
« coopérative ».
Le choix d’une personnalité d’envergure nationale
Son remplacement changera-t-il la donne ? Autrement dit, et pour poser la question que tout le monde se pose, Saint-Denis va-t-elle désormais s’imposer comme la ville centre de la communauté ?
Le choix de Patrick Braouezec, l’emblématique maire de la cité des rois, pour lui succéder, pourrait le laisser penser. Pour autant, ce sentiment mérite d’être nuancé. D’abord, parce que pour prendre la présidence de Plaine Commune en janvier, Patrick Braouezec quittera son fauteuil de maire en décembre. Rien ne l’y obligeait.
Il aurait pu tout aussi bien cumuler les deux fonctions. Qu’il y renonce témoigne donc d’une volonté d’éviter la confusion des genres. Ce n’est pas le maire en titre de Saint-Denis qui sera à la tête de l’agglomération et cette différence a son importance.
Mais surtout, ce passage de relais s’explique par une raison plus essentielle que l’influence grandissante que l’on prête à la ville du Stade de France.
Alors que Plaine Commune atteint sa vitesse de croisière, la traversée à venir s’annonce plus périlleuse que le chemin déjà parcouru. Parce que son ambition est de concrétiser dans les prochaines années une cinquantaine d’aménagements majeurs (ici : la Porte d’Aubervilliers, des interventions urbaines à la Villette, au Landy et dans les quartiers nord de la ville, etc.), les moyens qui seront nécessaires à l’agglomération sont d’une autre ampleur que ceux dont elle dispose.
Par la voie d’un communiqué de presse, c’est Jacques Poulet lui-même qui a dévoilé le véritable enjeu de cette succession : « A cette étape charnière, la reconnaissance de l’agglomération et de son projet nécessite d’être portée et entendue à une autre échelle pour prendre plus de force. »
Parce qu’il est une personnalité d’envergure nationale, Patrick Braouezec est sans doute le plus à même de jouer la partie serrée qui s’annonce avec l’Etat pour qu’il prenne toute sa part dans le développement de ce territoire (notamment en ce qui concerne les transports en commun). Parmi les villes et les regroupements de communes d’Ile-de-France, Plaine Commune est désormais la deuxième collectivité en ordre d’importance après Paris.
Cette réalité démographique engendre des devoirs pour les pouvoirs publics. Qui, visiblement, traînent des pieds malgré les bonnes paroles prononcées sur un nécessaire rééquilibrage de l’Ile-de-France en faveur du Nord-Est parisien. Le nouveau président de l’agglomération devra faire presser le pas aux récalcitrants.
Ce changement de tête, même s’il a été annoncé dans une certaine confusion, recueillera, c’est très probable, l’aval d’une large majorité des élus de l’agglomération.
Y compris au sein de la délégation d’Aubervilliers qui jouera, là, la carte de l’intérêt collectif.
Dépassée, la vieille rivalité entre
les deux villes ? Clochemerle a du plomb dans l’aile...
A condition, bien sûr, que Saint-Denis ne se fasse pas trop envahissante !
Frédéric Medeiros