Archives de la Ville d’Aubervilliers

Fadila Belkebla est au Théâtre des Amandiers jusqu’au 11 avril

publié le 19 avril 2004

Sur la scène des Amandiers, elle est Raïssa, folle, farouche et déterminée à retrouver la tombe de sa mère qui l’a pourtant maudite en mourant, puis ? ? ? une fille séduisante, instruite, intelligente, trop, pour les intégristes de son quartier...
A la ville, elle est Fadila, une Albertivillarienne, native d’ici, originaire d’Algérie, à la silhouette gracile malgré une grossesse récente, au regard envoûtant, au sourire charmeur mais au verbe acerbe et rageur quand on la cherche... A 35 ans, elle a tourné avec des grands noms du cinéma : Claude Brasseur, Marie-Christine Barrault, Marie et Jean-Louis Trintignant, Roshdy Zem, Gad Elmaleh, Vittoria Abril, pour ne citer qu’eux. Entre son premier film, Douce France de Malik Chibane, tourné en 1995, et son dernier long métrage Droit d’asile de Jean Marboeuf, sorti en 2002, 13 films se sont succédé. Le talent s’est bonifié.

15 films et une première pièce de théâtre
Mais le cinéma ne lui suffisait plus, alors Fadila s’est essayé au théâtre. Depuis le 5 mars et jusqu’au 11 avril, elle joue au Théâtre des Amandiers, dans une pièce de Laurent Gaudé, Les sacrifiées, mise en scène par Jean-Louis Martinelli.
Dans la famille Belkebla, elle est la 7e d’une fratrie de 10 enfants tous grandis au premier étage d’une tour de la cité Gabriel Péri. L’école Joliot Curie, le collège Gabriel Péri puis le lycée Le Corbusier aideront à faire pousser des ailes à cette jeune fille enjouée, vive et curieuse. Son cinéma, elle se le fait déjà avec les copines sous les auvents des bâtiments de sa cité où elle mime les chorégraphies disco vues à la télé.

Elle a 16 ans, lorsque des copains de ses frères, Killy et Antonio Olivares, lui offrent l’opportunité de tourner un court métrage. « Un joli souvenir que je croyais sans lendemain... ». Mais le talent est là, Antonio ne s’y trompe pas.
En 1995, il établit le contact avec le réalisateur Malik Chibane qui cherche une jeune fille pour tenir le rôle d’une gamine qui choisit de se voiler contre l’avis de sa famille. Ce sera le début d’une longue série. « J’ai mis du temps à me convaincre que je pourrais vivre de ce métier, alors au début j’alternais les missions en intérim et les tournages.
Avec le recul, je pense que cela m’a bien aidée à garder les pieds sur terre et la tête froide », reconnaît Fadila. Attirée par le théâtre, elle a tout fait pour obtenir le rôle de Raïssa dans la pièce de Laurent Gaudé : « C’est un personnage fabuleux, un rôle extraordinaire pour débuter au théâtre !
A l’issue de mon bout d’essai, j’ai mis Laurent en garde : “Je te préviens, si tu ne me prends pas, tu auras deux Raïssa sur scène, tant pis pour toi !” Cela l’a beaucoup fait rire et il a dû avoir peur puisque j’ai eu gain de cause. »

Après avoir beaucoup voyagé et habité quelque temps à Paris, Fadila a choisi de revenir s’installer à Aubervilliers. Aux Quatre-Chemins d’abord et maintenant au centre-ville. On peut la croiser, ses courses à la main, toujours pressée mais n’omettant jamais de saluer ceux qui la reconnaissent, filant vers son appartement impatiente de retrouver son bébé avant de se rendre au théâtre. La famille Belkebla a fini par quitter le F4 de la cité Gabriel Péri, chacun des enfants a suivi son destin, commerçants, footballeurs, conseiller d’orientation, enseignants, assistante de direction, mais tous reviennent tourner autour du nid familial installé à quelques rues de la cité, dans un confortable pavillon.


Maria Domingues


Photo : Willy Vainqueur